Avant de présenter mon activité de DJing, je dois d’abord situer le contexte : j’ai commencé à musicaliser et à constituer ma collection au tout début des années 2000 lors de mes propres soirées. J’étais le premier à Paris à passer de la musique depuis un ordinateur via Winamp sorti en 1997 ! Cela me permettait de me déplacer avec un ordinateur au lieu d’une caisse de CDs et de disposer de mes morceaux immédiatement. Après avoir été un peu raillé au début, tout le monde a fini par suivre :-).

De plus, de nombreux DJ ont commencé leur carrière dans mes événements. Aujourd’hui, je me déplace un peu partout pour animer des festivals et des grands événements en plus de mes autres activités.

Lorsque j’ai commencé, il n’y avait pas autant de production musicale qu’aujourd’hui. Le renouveau du tango était encore à ses débuts. Si ma spécialité a été le tango traditionnel, c’est d’abord parce que la meilleure musique était, et reste encore probablement aujourd’hui même si c’est un peu moins vrai, celle des années 40.

Il me paraît important de connaître l’abécédaire des orchestres avant de s’improviser DJ. Les tangos traditionnels sont souvent ceux que tous les danseurs chevronnés connaissent et recherchent car ils connaissent exactement la structure musicale, ce qui les aide à danser. Mais au-delà de cela, les tangos traditionnels sont, pour moi aussi, ceux qui donnent le plus de sentiment de danser « le vrai tango ». Le fait de passer des « vieilleries » constitue une forme de transgression revendiquée et assumée par la plupart des aficionados à travers le monde.

Néanmoins, le tango est avant tout une question de connexion, et il me semble que pour que le tango puisse s’affirmer comme quelque chose de bien réel, il doit également être ancré dans le présent avec des orchestres actuels qui jouent une musique avec des moyens modernes.

Donc, je pense que le rôle du DJ est aussi d’aider à « patrimonialiser » des tangos récents tout en veillant à préserver l’héritage des grands orchestres et à faire en sorte que les racines n’empêchent pas l’arbre de continuer à grandir.

En ce qui concerne la manière de mixer, je n’ai pas de recette secrète. Je joue ce que j’ai envie d’entendre quand je danse, je varie les orchestres en tandas, j’agence les morceaux en essayant de ne passer que des thèmes que je considère comme « exceptionnels », en me disant par exemple « tiens, après ça, je verrais bien un Tanturi – Campos » (ou autre chose) tout en veillant à une répartition harmonieuse des tandas chantés, instrumentaux, de tangos, de valses et de milongas.

Enfin, lorsque je suis sollicité, j’essaie de savoir quel type de musique on attend de moi pour quelle ambiance de milonga souhaitée. J’essaie de répondre exactement au cahier des charges en personnalisant un peu les tandas si on me le demande. Je peux ajouter quelques tangos orientaux, quelques tangos exotiques ou des musiques dont les rythmes pourraient convenir, mais toujours dans la limite du raisonnable, c’est-à-dire en restant dans le domaine du dançable et dans une proportion limitée en marge de la soirée.

Enfin, les cortinas participent aussi à l’ambiance de la milonga et dans ce contexte j’y attache beaucoup d’importance. Je peux même proposer des cortinas en live avec ma guitare !